jeudi 15 août 2013

Joyland – Stephen King



Cela fait trente ans que je suis un « Constant Reader » de Monsieur King, que j’ai suivi lors des ses « ratages » (Tommyknockers, Dreamcatcher, Duma Key, et quelques autres) et je me réjouis de le voir retrouver une inspiration pleine entière tout en nous faisant bénéficier de son expérience d’auteur serein et sage ;-)
Sérieusement, avec Nuit Noire, étoiles mortes, Dôme, 63/11/22 et même Blockade Billy et maintenant ce Joyland, je me suis trouvé plongé dans les histoires de Papy King, emporté par la main par son style inimitable, mâtiné de la nostalgie et du désabusement de ses vieux jours. Et pourtant, malgré la noirceur et les péripéties, je trouve toujours un incroyable optimisme et une évidente jubilation du conteur qui me fait à chaque fois attendre avec impatience le prochain volume... Puisse-t-il garder encore longtemps sa fraîcheur d’écrivain et son enthousiasme de narrateur, le paysage serait trop vide sans notre King annuel...

« Petit » roman de Stephen King, par la taille, ce Joyland paru dans la même collection que le bien plus anecdotique « Colorado Kid » voit le narrateur nous raconter l’été de ses 21 ans, pendant lequel, pour faire bouillir la marmite et contribuer à financer ses études, il trouva un emploi de saisonnier dans un parc d’attraction, que les monstres Disneyiens ne menaçaient pas encore... Ce parc, où il espère voir se disparaître son premier chagrin d’amour, a été autrefois le lieu d’un horrible crime non élucidé, et le train fantôme abrite, paraît-il, un fantôme...
Ahhhh, le mot est lâché. On est dans un Stephen King, donc vous pouvez rayer le « paraît-il » : il y a un fantôme. Et un criminel impuni. Et un enfant qui possède « the sight » (le « shining », quoi). Et un jeune héros tout aussi héroïque qu’ordinaire, des amis indéfectibles, des têtes de con, des vieilles dames sympathiques, du rock’n’roll, de l’amour, et même Howie the hound, une version romancée de Scooby-Doo, histoire de ne pas avoir de souci de copyright (mais la référence est ouvertement citée, ça évitera aux râleurs de parler de plagiat, il n’y aura pas de procès d’Hanna-Barbera contre King ;-) )
L’auteur lâche ses éléments « durs » par petits morceaux, comme d’habitude, et il s’intéresse davantage à ses personnages, à leur vie, à leur interaction, il parsème le tout des réflexions de notre narrateur d’une soixantaine d’année regardant quarante ans en arrière, ce qui donne le ton doux-amer, mêlant nostalgie et ironie, pas très lointain de celui de « 63/11/22 » d’ailleurs. On le suit dans cette histoire avec plaisir, en oubliant le pitch parfois. Et on se dit soudain « mais au fait, il n’y avait pas un fantôme dans cette histoire ? » C’est ce que King a dû se dire aussi, alors, il y est revenu, c’est ce que j’adore dans le bouquin : on y revient, tout est expliqué, élucidé à un moment ou un autre sans effet grandiloquent, ni débauche de surnaturel. Juste ce qu’il faut. Un délice.
C’est un court bouquin et c’est très bien, car c’est une petite histoire. Il y a dix ans, elle aurait peut-être été artificiellement gonflée pour atteindre le « format best-seller » et c’est ce qui a donné certains des romans les plus mal fichus du King. Là, elle a juste l’épaisseur dont elle a besoin pour se développer harmonieusement, se raconter, se vivre et se résoudre. J'ai adoré chaque moment que j'ai passé à le lire, me délectant des odeurs, des saveurs, des émotions. Un régal de bouquin...

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